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Professeur Layton vs. Phoenix Wright : Ace Attorney

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Le premier rencontre le succès dans le monde entier, le second seulement au Japon grâce aux efforts de Capcom. Malgré deux philosophies assez distinctes, les deux plus grands enquêteurs du jeu vidéo japonais se rencontrent pour un jeu 3DS disponible en Europe. Reste à savoir si cette union nous offre le meilleur, ou bien le pire.

Les colocataires de Labyrinthia

De l’aveu des développeurs, ce cross-over n’avait rien d’évident car, bien qu’appartenant tous les deux au monde des jeux d’aventures textuelles, ces deux licences possèdent chacune leur propre philosophie, deux approches bien distinctes.

Nous sommes tout d’abord à Londres, ville d’origine du professeur Layton et de Luke, où se tient un colloque des avocats, auquel Phoenix Wright et Maya Fey se rendent. Cette nuit-là, après avoir été mis au courant d’événements étranges, nos quatre héros sont aspirés dans un livre et arrivent à Labyrinthia. Dans cette cité médiévale, ils devront enquêter sur des histoires de sorcières et surtout, sur les secrets que cache cette étrange cité.

Je ne vous en dis pas plus, bien qu’en apparence assez classique, le scénario est bon et les différents mystères nous captiveront jusqu’à la fin.

Intéressons-nous à ce que peut donner ce cross-over. Si l’idée est toujours alléchante sur le papier, elle ne l’est pas souvent console en mains. Dans une série comme Marvel vs Capcom par exemple, les fans de Street Fighter ne retrouvent pas l’aspect technique du gameplay, qui est remplacé par une plus grande accessibilité pour une mise en scène détonante.
On ne dirait pas comme ça, mais pourtant, Ace Attorney et Prof. Layton sont tous deux aussi différents que Street Fighter et Tekken ou encore Mario et Rayman.

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Le professeur Layton a été pensé comme le prolongement du programme d’entraînement cérébral de Kawashima. Maintenant que le grand public a pris conscience qu’il était possible de se creuser la tête devant des énigmes de mathématiques ou de mémoire dans un jeu vidéo, l’idée était de leur proposer l’enrobage qui va autour, chose totalement absente du logiciel de tonton Kawa. Avec le professeur Layton, il est parfait. Premièrement, le design général du jeu enlève totalement l’idée de violence, nous suivons un Sherlock Holmes gentillet et un petit garçon qui vont suivre une aventure tout en répondant à des énigmes. Des énigmes avec un énoncé clair qui se rapprochent davantage de ce qu’on peut trouver dans un cahier de vacances plutôt que celles que l’on trouve habituellement dans les jeux vidéo, demandant une logique très particulière pour les non-initiés.
Il est arrivé à point nommé et cette idée de génie fonctionne.

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Ace Attorney a vu le jour sur Game Boy Advance, à une époque où le jeu vidéo était encore très tourné vers son nombril. Étant un jeu textuel, le joueur se laisse porter par le scénario, il reste la plupart du temps inactif devant sa console, à lire, encore et encore. Malgré un enrobage léger et des personnages stupides (Paul Defes), cette série demande un certain investissement en mémoire et la linéarité du jeu force le joueur à s’adapter à la logique des développeurs en soumettant la bonne pièce à conviction au bon moment et ce, sans la moindre aide si l’on galère.
Ajoutez à cela le fait qu’incarner un avocat n’a rien de très excitant et qu’en plus, le marketing inexistant hors Japon de Capcom n’a pas vraiment aidé la série à se faire connaître, malgré une Nintendo DS plutôt adaptée pour le jeu. Seul le premier épisode a eu le droit à un peu de promotion et pour cause, c’est Nintendo qui s’est chargé de l’édition !

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Que donne donc la réunion de ces deux écoles du jeu d’enquête ?
Rien, puisqu’il n’y en a pas.

Si les deux personnages collaborent effectivement dans le scénario du jeu, sur lequel je reviendrais plus tard, cela n’est pas le cas en terme de gameplay. Comme vous pouvez vous en doutez, Layton se chargera des enquêtes et Phoenix des procès. Les deux phases se découpent de manière bien distinctes en chapitres et ne viendront se mélanger que timidement le temps d’une seule énigme ratée.
Au final, ce n’est pas plus mal, je dirais même que c’est intelligent ! Au lieu de nous pondre un système de jeu hybride et fan-service bien sale, où les énigmes seraient résolues en relevant des contradictions, chacun agit sur son territoire, là où il est le plus performant. Le jeu n’en est que meilleur car il prend ce que chaque série offre de mieux.
Personnellement, je préfère cent fois les procès aux enquêtes dans la série Ace Attorney, ces dernières sont trop bavardes, pas assez interactives ni rythmée. Tandis que dans Layton, même si les énigmes viennent ponctuer les promenades, on aimerait parfois un peu plus de théâtralisation. C’est en ça que ce cross-over est excellent, car il possède une bonne dynamique. L’histoire évolue durant les phrases d’enquêtes et les procès interviennent pour nous donner des moments intenses.

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Cependant, comme je l’ai dit plus haut, ces deux séries appartiennent à deux écoles du jeu vidéo, qui plus est pour des portables ! Les ballades à la cool du Prof. Layton peuvent être facilement interrompues à tout moment, mais les longs procès de Phoenix Wright beaucoup moins, tant le dynamisme est constant et qu’il est facile de perdre le fil si l’on éteint et rallume sa console 24 heures après. C’est ce qui sera pour moi le seul point négatif du jeu : son rythme inégal et qui change du tout au tout. En même temps, il aurait été difficile de faire autrement sans perdre l’intensité des procès de Phoenix, quand bien même la série principale accordait de courtes pauses dans la salle d’attente. Ici, pas de temps à perdre, il s’agit de sorcières !

D’ailleurs, pour ceux qui se posent la question, le “VS” présent dans le titre du jeu ne révèle absolument pas une quelconque confrontation des personnages qui, au contraire, collaborent tout le long. Comme je l’ai montré durant cette partie, les développeurs souhaitaient exprimer là la confrontation de leurs deux univers. Certes, ça induit le joueur en erreur, mais on s’en fout !
Par contre, le tout premier trailer du jeu montre cette fameuse confrontation, ainsi que plein d’autres choses qui ont changés entre temps. J’imagine qu’il a été difficile de mettre en scène ce duel sans en faire perdre un face à l’autre lorsque la vérité éclate.

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Capcom et Level 5, main dans la main

Si les gameplay des deux séries ne font que se croiser sans se mélanger, la direction artistique s’est en revanche bien fait plaisir !

Que ce soit dans le design des personnages, où la bande son, les équipes créatives nous ont produit un excellent travail fan-service qui rend honneur aux deux univers.

Mais revenons d’abord au scénario qui est à mon sens une grande réussite de cette réunion.
Dans les jeux du professeur Layton, celui-ci a pour habitude de nous emmener dans des lieux étranges, souvent déconnectés du monde où des phénomènes inexplicables surviennent. En avançant dans son enquête, ceux-ci deviennent compréhensibles, mais toujours avec une pointe de fiction (de gros robots par exemple). Phoenix reste quant à lui très ancré dans le monde réel, mais avec un zeste de mysticisme qui obéit cependant à certaines règles.
Dans ce cross-over, c’est encore une fois un bon mélange des deux. Labyrinthia n’appartient pas à notre monde car la magie et les sorcières y occupent une forte place, cependant, même la magie à ses règles et ses limites. Même si nos deux héros ne cesseront de dire que ce monde n’est pas logique, il l’est, car lors des procès, il faudra vous adapter à celle de ce monde, ce qui est, je trouve, un excellent point qui amène sur d’autres pistes de réflexions. Phoenix s’en rendra vite compte : l’empreinte digitale est un terme inconnu ici !

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Finalement, c’est notre avocat qui plonge en terre inconnue, Layton lui, a l’habitude de ce genre d’univers et semble très peu dépaysé.

Il y a pour moi un point intéressant dans ce scénario écrit par Shu Takumi, créateur de la série Ace Attorney, c’est le traitement des deux principaux personnages. Comme c’est le cas dans ses jeux, Phoenix vous laisse lire ses pensées, qui sont celles d’un homme pas très sûr de lui-même mais qui possède une foi inébranlable en ses pairs. Du coup, le professeur, qui conserve comme d’habitude son air mystérieux et son excellent sens de déduction, apparaît ici comme une sorte de mentor pour l’avocat ! A plusieurs reprises, il aura un coup d’avance sur lui en lui donnant quelques bons coups de pouce lors du premier procès de sorcière par exemple. Layton est sans conteste le leader de ce petit groupe, il sait toujours quoi faire et le fait avec calme. Au final, le joueur ira davantage s’identifier à Phoenix, personnage le plus normal, qui évolue au même niveau que nous et avec qui on engrange plus facilement de satisfaction durant les procès.
Ce qui est rigolo, c’est que ce rôle de mentor que j’ai décrit est exactement celui de Phoenix dans Ace Attorney 4 et 5. A la cool, il laisse les jeunes gérer mais garde un coup d’avance. Ces épisodes n’ayant pas été dirigés par Shu Takumi, cela fait bizarre de revoir l’avocat revenir à son comportement premier.
Vous me direz, c’est aussi un grand cliché de la japanim’.

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Un point important dans chacune des séries, c’est l’excentricité des personnages. Elle participe d’ailleurs beaucoup à l’humour des Ace Attorney. Le partage des tâches est évident à constater et il est à mon sens parfait. Les personnages secondaires et sérieux sont dessinés par les équipes de Capcom, Level 5 s’est chargé des autres, les originaux et leurs tics qui viennent témoigner ou font vivre la cité. Le style cartoon de Layton colle très bien avec les personnalités voulues et les différents personnages stupides.

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Musicalement, la qualité est aussi au rendez-vous. Les thèmes originaux sont évidemment médiévaux et réussis, mais le plus plaisant à entendre se situe à mon sens dans les thèmes principaux des différentes licences. Ace Attorney est celle qui a le plus tiré parti de ce cross-over musical. Les musiques bien connues de la série sont d’abord audibles de manière réorchestrée mais sans changements fondamentaux bien que très réussies. C’est après la rencontre avec Layton que ces thèmes reviennent avec des instruments appartenant à l’univers musical du professeur et du médiéval. Mon préféré se nomme “Mob Cross-examination ~Allegro” où les clochettes et accordéons se mélangent parfaitement à ces instants des procès où la réflexion est à son comble. Un thème assez cher à notre gentleman !


Quel dommage en revanche que les musiques de ce dernier n’aient pas eu le même traitement. Durant tout le jeu, elles restent dans la même lignée de la série, sans profiter de ce cross-over pour se risquer à un petit remix, ni même une variation. Seuls les crédits de fin nous donneront enfin quelque chose de neuf de ce côté-là. Un dernier hommage musical magistral !

La collaboration ne s’arrête pas là, les différentes sonorités s’accordent également entre-elles, comme les “bruits de dialogues” si particuliers de la série Ace Attorney qui se mélangent avec les sons fidèles à l’interface des ballades de Layton et Luke.
En parlant d’interface, celle-ci adopte celle du professeur, plus complète et moins austère que celle de l’avocat. D’ailleurs, les pièces SOS sont toujours de la partie et Phoenix pourra en profiter lors de ses procès !

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L’union fait-elle la force ?

Comme je vous l’ai dit plus haut, les deux univers ont très bien fait de ne pas se mélanger, en revanche, Capcom a introduit une nouvelle mécanique dans son gameplay, chose que Level 5 n’a pas jugé nécessaire !
Phoenix peut maintenant interroger plusieurs témoins à la fois. Le but est de surveiller les réactions des autres aux témoignages de l’un et de les questionner sur le sujet. Cela donne très souvent un joyeux bazar très drôle dans l’assemblée des témoins.
En dehors de ça, rien d’autre n’a été expérimenté, à par cette énigme ratée dont je vous parlais tout à l’heure.

L’association de Level 5 et Capcom a donné un très bon jeu, mais qui n’est pas pour autant meilleur que ce qui s’est fait dans les deux séries et ce en dépit de Phoenix ayant quitté son format épisodique. Comme tous les cross-over, Layton VS Ace Attorney est avant tout un jeu fan service, mais dans le bon sens du terme, car il a su préserver les deux licences.

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L’aventure vous prendra entre 25 et 30 heures de votre temps, ce qui est très bien, mais souvent un peu trop comblé en parlote inutile à base “d’auto-congratulation” où chacune des parties ne loupe jamais l’occasion de jeter des fleurs à l’autre. Ce qui est parfois un peu lourd et souvent inutile. A mon sens, cela aurait été plus justifié si les deux hommes se connaissaient de réputation avant de se rencontrer. Après tout, ils ont tous les deux fait de grandes choses dans leurs jeux respectifs ! Ces dialogues auraient alors été là pour constater les talents en pratique.
Par contre, pour ceux qui en voudraient encore, 12 DLC gratuits seront mis à disposition une fois le jeu terminé ! Ce sont des mini-chapitres complémentaires qui prennent place après l’histoire, ils alternent une fois par semaine avec des galeries d’illustrations sur les coulisses du jeu. Une bonne nouvelle pour prolonger le plaisir !

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Que dire d’autre à part s’attaquer à l’aspect technique du jeu ? Graphiquement il est propre, mais je trouve Ace Attorney 5 plus beau et plus coloré, on sent que le moteur est celui de Level 5. La 3D est pour une fois assez impressionnante en profondeur, je vous invite à l’activer régulièrement pour le constater.
Petite touche que j’aime traiter : le doublage ! La fameuse VF !
Celle-ci est réussie, à quelques fausses notes et un personnage près. Layton et Luke avaient déjà leur doubleurs attitrés, mais ce n’était pas le cas pour Phoenix et Maya ! Le premier est incarné par Donald Reignoux, un doubleur au long CV et qui prête sa voix à Peter Parker dans les récents films “The Amazing Spiderman”. Son boulot est excellent et sa voix colle parfaitement à notre avocat. Maya est quant à elle doublée par Geneviève Doang, qui n’a pour l’instant fait que des seconds rôles. Elle fait des voix-off pour la chaîne Nolife et a déjà participé au doublage d’un Layton, en prêtant sa voix à Gaia dans le dernier épisode.
L’équipe est crédible et convaincante. Seule Aurora nous fera grincer des dents lors de ses apparitions.

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En bref :

J’aime :

  • Le cross-over Prof. Layton et Phoenix Wright !
  • Le respect des licences
  • Une histoire captivante
  • Les procès et ce qu’ils apportent
  • La bande-son et surtout les remix
  • Un bon doublage

J’aime pas :

  • Un prof Layton qui fait dans le classique
  • Beau mais pas autant qu’Ace Attorney 5
  • Du blabla parfois long et inutile
  • Un rythme inégal dû aux mélange des licences

Note finale : 17/20
Cela donnait envie et on aurait pu craindre le pire, mais ce n’est pas le cas. Professeur Layton vs Phoenix Wright Ace Attorney est un excellent cross-over qui fait honneur aux deux séries car ce jeu a été conçu dans le respect de celles-ci. L’histoire est intéressante, les procès captivants et le fan-service est bien présent. Au final, on en redemande et on espère une suite !
Si les différents jeux vous plaisent, vous auriez tort de passer à côté de celui-ci, car il ne s’agit pas d’une collaboration opportuniste, mais bien d’un bon jeu d’aventure.

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Ne partez pas comme ça !
Je vous ai parlé tout à l’heure du tout premier trailer qui annonçait bel et bien une confrontation entre Layton et Phoenix ! Voici une petite minute du prof qui vous montrera quelques artworks sympathiques sur les pistes de développement de ce cross-over, il suffit de cliquer sur l’image !

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