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Picross 3D

Le

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Dans le monde du jeu vidéo, quand on parle de passer de la 2D à la 3D, les dents grincent. On repense à Bubsy 3D, à Sonic R, à Castlevania 64, à la Virtual Boy, à la 3DS, à Street Fighter EX… La liste est longue et tous les noms qui y figurent ne font que nous rappeler autant d’échecs cinglants. Qui plus est, le picross est un jeu de réflexion qui peut déjà s’avérer particulièrement retors en 2D. Assemblez ces deux idées, ça donne le Picross 3D de HAL Laboratory. Alors, est-ce que le jeu y gagne en profondeur, ou est-ce que tout ça tombe à plat ?

Ils nous ont volé not’ recette ! Pi-cross !

Je ne vais pas vous faire un historique de ce qu’est le picross, rassurez-vous, vous échappez au copié-collé de la page Wikipédia. Il est toutefois bon de noter que ce petit jeu de méninges a beaucoup à voir avec Nintendo. En effet, l’entreprise a associé le nom de sa mascotte avec ce puzzle-game pour deux épisodes Game Boy et un épisode Super Famicom, développés par le studio Jupiter, qui développera ensuite le Picross DS qui précède cet épisode, et puis la série des Picross e sur eShop 3DS. C’est donc la première fois que les gars de HAL Labs s’attaquent à un jeu de picross, et ils décident dans la foulée d’innover. Mais avant de parler de cette troisième dimension, il convient de remettre les choses à plat et de rappeler le concept du picross.


Prenez une grille, généralement de 5 cases par 5, ou 10 par 10. Au-dessus de chaque colonne et à gauche de chaque ligne, ajoutez des nombres. Vous avez obtenu une grille de picross. Le but du jeu est de remplir la grille, pour au final former un motif particulier. Les nombres à gauche et en haut de la grille définissent en fait le nombre de cases que vous devez remplir dans la ligne ou la colonne correspondante. Par exemple, si vous avez un 10 en face d’une ligne d’une grille 10×10, vous devrez remplir toutes les cases de cette ligne. Si vous avez un 0 au-dessus d’une colonne, vous devez ne pas en remplir une seule (en général, les jeux vidéo de Picross vous permettent de cocher les cases que vous savez que vous ne devez pas remplir). Il y a aussi des subtilités, par exemple si vous avez plusieurs nombres en face d’une rangée, ça signifie qu’il y a plusieurs groupes de cases remplies consécutifs, séparés par une case libre ou plus (ex : 2 2 en face d’une rangée dans une grille 5×5 signifie que vous devez remplir 2 cases, en laisser une libre et remplir les 2 autres).


Voilà pour le concept de base. C’est un jeu redoutablement simple en apparence, et qui se prend en main très rapidement. Les grilles 5×5 posent très peu de problèmes, mais plus on continue et plus les grilles grandissent, et plus il devient difficile de savoir que remplir. C’est un jeu qui repose beaucoup sur votre capacité à faire des simulations mentales : vous devez vous représenter toutes les situations possibles sur chaque ligne et colonne pour trouver quelles cases seront forcément remplies et quelles cases ne seront forcément jamais remplies. Prenons un exemple simple. Si vous avez 4 en face d’une ligne d’une grille 5×5, alors il y a deux options possibles : soit les quatre premières cases sont remplies et la dernière est vide, soit la première est vide et les quatre dernières sont remplies ; dans les deux cas, les trois cases du milieu seront remplies, donc vous pouvez remplir ces trois cases en attendant d’avoir un indice qui vous permettra de déterminer quel côté devra être rempli. Au fur et à mesure qu’on joue, on développe des automatismes qui seront d’autant plus importants que les jeux vidéo de picross aiment à vous chronométrer, mais il restera des situations exotiques qui vous demanderont toujours de vous creuser la tête pour comprendre quoi faire. C’est en tout cas un jeu très stimulant, et que la récompense finale de voir le dessin fini est toujours très agréable.

Ça, c’était pour la 2D. Ajoutons la troisième dimension et voyons ce que ça donne.



Vous vous retrouverez donc face à des blocs composés de petits blocs. Sur ces petits blocs figurent des nombres, mais pas sur tous, sinon ça serait trop facile. Comme d’habitude, il vous faudra colorer les blocs qu’on vous demande, mais dans cette version, vous devrez défoncer à coup de piolet les blocs dont vous n’avez pas besoin (ceux que vous cochiez quand on jouait encore en 2D), tel le sculpteur moyen virant de son œuvre les bouts de caillou malvenus. Conséquence directe : si vous virez un bloc dont vous aviez en fait besoin, vous serez pénalisé (mais on parlera de ça plus tard). Ainsi, à force de sculpter votre bloc, vous finirez par obtenir un objet en 3D, que vous verrez s’animer en fin de partie, ce qui est bien sympa. Autre particularité : il n’y a plus de suites de nombres comme avant (on a pas la place sur ces petits blocs). À la place, vous trouverez certains nombres qui seront entourés ou encadrés. Si le nombre d’une ligne est entouré, ça signifie que la ligne comprend deux groupes de blocs à colorier, séparés par au moins un bloc à briser, et le nombre correspond à la somme des blocs compris dans les deux groupes (par exemple, si vous avez un 4 entouré, ça peut vouloir dire 2 2 ou 1 3 ou 3 1). Si ce nombre est encadré, ça signifie que la ligne comprend AU MOINS trois groupes de blocs à colorier. V’là la prise de tête.


Deux petits détails pratiques à noter : pour parcourir le schmilblick, il suffit de glisser le stylet dessus pour le faire tourner dans l’espace tridimensionnel et l’observer sous toutes les coutures. Ce n’est toutefois pas suffisant pour colorier confortablement des blocs, surtout ceux à l’intérieur de la forme. Donc vous avez le droit à deux petites glissières, que vous pourrez manipuler de façon très naturelle pour voir des coupes de l’objet en long ou en large. Du coup, vous vous retrouverez en général à parcourir l’objet dans sa longueur, tranche par tranche, puis dans sa largeur, idem, et puis dans sa longueur et ainsi de suite jusqu’à ce qu’il ne reste plus de blocs indésirés. Mais du coup, si vous pouvez glisser le stylet sur l’objet pour le mater, comment vous pouvez casser et marquer ? Tout simple, il vous suffit de maintenir la droite sur la croix directionnelle pour colorier les blocs sous votre stylet, et le haut pour les casser (si vous maintenez le stylet à un endroit, vous pouvez détruire les blocs en série). Qui plus est, les boutons sont intégralement paramétrables, et complètement symétriques (pour que les gauchers puissent y jouer sans problèmes).


Si vous connaissez un peu le picross, vous remarquerez que les développeurs ont tenu à compliquer salement le jeu (en ne mettant pas des nombres sur tous les blocs et en compliquant la façon d’identifier les groupes multiples de blocs). Pourquoi ça ? Tout simplement parce qu’au lieu d’ajouter du challenge, la troisième dimension simplifie beaucoup le jeu. En effet, dans une grille traditionnelle de picross, si vous étiez coincé, bah il fallait réfléchir plus fort, ou alors y aller à la one again, comme au Démineur, et risquer de se planter en beauté. À l’inverse, quand on a une troisième dimension, si on n’arrive pas à avancer dans la coupe en longueur de la forme, on peut simplement passer à la coupe en largeur, donc on a un indice de plus qu’en 2D. Si l’on avait des nombres pour toutes les lignes en largeur, en longueur et en profondeur, on résoudrait donc ça très vite, il était donc nécessaire de handicaper le joueur. Les nombres sont donc répartis autour de la forme avec parcimonie de sorte à rendre la progression naturelle et fluide. Ce que vous faites dans la figure en largeur vous aide à vous débloquer en longueur, et inversement. HAL Labs nous proposent donc une adaptation en 3D réfléchie et bien conçue de ce jeu de réflexion, qui, loin d’être gadget, permet de renouveler la façon dont on joue au Picross, en nous forçant aussi à utiliser notre sens de l’observation, et c’est carrément bienvenu.


Toutefois, je tiens à dire que même si le jeu est globalement bien conçu, il y a des fois, comme au démineur, où l’on se retrouve dans des situations insolubles. Un exemple de grille insoluble dans le picross traditionnel : une grille 2×2 avec seulement des 1 en face des lignes et des colonnes. Bien entendu, je ne suis pas le Kasparov du picross, donc il est possible qu’il existait une solution à chaque fois que je me suis retrouvé bloqué, mais j’ai tout de même eu l’impression que le jeu me menait parfois dans des impasses dont je ne peux me sortir qu’en essayant de deviner quels blocs peuvent être supprimés en regardant la forme qu’on a obtenu. C’est d’autant plus frustrant que le jeu vous encourage à finir dans un temps imparti (généralement raisonnable mais qui demande de ne pas traîner) et à ne jamais vous rater si vous comptez obtenir les trois étoiles dans un puzzle. Quand on doit recommencer vingt minutes de picross parce qu’on s’est gouré, forcément, c’est relou (mais vous n’êtes pas obligé de viser les trois étoiles sur TOUS les puzzles, bien entendu). Cela dit, le second essai est souvent plus simple, parce qu’on se souvient de la forme qu’on a obtenu donc on peut assez rapidement revenir à l’état dans lequel on était précédemment. Il reste que plus on avance dans le jeu et plus on trouve de grilles longues, au-delà de 20 minutes, ce qui est assez casse-pieds et peut couper temporairement l’envie de jouer. Qui plus est, le système de jeu pousse un peu au crime, puisqu’il existe une fonctionnalité de sauvegarde rapide, qui vous permet de vous interrompre au milieu d’un puzzle pour reprendre plus tard. Cela dit, même quand vous reprenez la partie, la sauvegarde n’est pas forcément supprimée, donc vous pouvez vous servir de ça comme d’un checkpoint artificiel. Pas très réglo, mais pratique.


Des grilles en priorité

Une chose est importante à noter par rapport au contenu de Picross 3D, c’est que c’est un gros jeu. Un très gros jeu. Proposant la coquette somme de 370 grilles (plus les 39 du mode Débutant servant de tutoriel très exhaustif, et facultatif) aux joueurs les plus courageux, et au rythme de 10 à 25 minutes par grille, il a su me tenir accroché à la console pour facilement une cinquantaine d’heures, probablement plus proche de soixante ou au-delà. Quand je dis gros, ça veut dire GROS, gros. Avec ça en poche, vous aurez de quoi faire quelques bons milliers de kilomètres en transports en commun, à l’aise. Et au cas où ça faisait petit bras, les développeurs ont cru bon d’ajouter un mode Random, vous permettant de rejouer au pif à un des puzzles que vous avez fini, avec la possibilité de choisir le temps imparti, le nombre d’erreurs tolérées et les modes de difficultés parmi lesquels le puzzle sera choisi. Et c’est pas tout, mais je parlerai de ça plus tard.


Mais détaillons ce contenu. Le jeu est divisé en trois niveaux de « difficulté ». Je mets le mot entre guillemets puisque même si l’on parle de difficulté, la courbe de progression de difficulté n’est pas forcément claire. On pourra alterner des grilles qui vous en feront chier et des grilles qui se passeront sans problèmes, et les dernières grilles du mode Facile sont plus dures qu’une bonne majorité des grilles du mode Difficile. En fait, c’est surtout une question de taille des grilles, plus que de difficulté, et à ce point de vue il y a effectivement une progression assez constante, et au sein des niveaux de difficulté, on peut effectivement voir une progression de la difficulté. Quand on arrive au bout du mode Difficile, on croise quand même des puzzles sacrément pénibles, gros et avec presque que des petits nombres qui font que le rythme de résolution du puzzle est bien plus lent, et moins agréable. Mais bref, si vous cherchez à vous creuser la tête, il y a moyen.


Au sein de chaque niveaux de difficulté, donc, on a 10 sous-groupes de puzzles, qui regroupent chacun huit puzzles principaux et deux optionnels à débloquer en obtenant suffisamment d’étoiles dans les puzzles précédents. On trouve aussi des puzzles à part ayant des règles un peu particulières, genre ceux qui ne vous laissent pas le droit à l’erreur, ceux qui ont un temps limité très court mais où vous pouvez gagner des bonus de temps en détruisant des blocs, ou encore les puzzles géants dont que vous devrez résoudre morceau par morceau. Un peu de variété pour éviter qu’on s’ennuie, donc.


Un truc intéressant à relever, c’est que le jeu propose un mode Mon Picross, qui vous permet de créer et de recevoir des picross faits à la main par les joueurs. L’éditeur de picross est bien fichu et vous permet de faire ce que vous voulez sans problème ni besoin du moindre tutoriel, puisque sa prise ne main est très intuitive. Vous êtes soumis aux mêmes contraintes que les développeurs : pas plus de 10x10x10. Quant au mode partage, apparemment il fonctionnait surtout à base de concours. Pourquoi l’imparfait et le « apparemment » ? Parce que comme vous n’êtes pas sans savoir, le service CWF Nintendo est mort en mai 2014, et avec lui les serveurs du jeu. Donc vous devrez vous contenter d’échanger des puzzles en local si vous trouvez des gens qui ont le jeu dans votre entourage.


Pour finir, parlons de l’habillage du jeu. Hormis la bande-son affreuse (une dizaine de morceaux en midi vraiment super sales, d’autant plus scandaleux que les trois zozos crédités pour la bande-son sont loin d’être des débutants) et la mascotte non moins hideuse du jeu (un poussin qui s’est pris un sale coup de poêle à frire, apparemment), le jeu offre une apparence simpliste. Le petit truc sympa, c’est que tous les puzzles, lorsque vous les résolvez, se mettent en couleur et s’animent, pour coller à l’objet, l’animal, le lieu ou la personne qu’ils représentent. C’est sympa comme tout à regarder et puis ça habille le menu principal, aussi. Qui plus est, chacun de ces puzzles résolus se rajoutent sur un tableau thématique, et l’un des objectifs du jeu est donc de compléter tous ces tableaux thématiques en résolvant tous les puzzles du jeu. Une petite motivation en plus, pas géniale mais bienvenue.

En bref…

J’aime :

  • Le principe du picross, toujours fun
  • Le passage à la 3D, intelligent et novateur
  • Contenu titanesque
  • Le moment où l’objet fini se dévoile

J’aime pas :

  • Des puzzles parfois trop longs
  • Des situations d’apparence insolubles, façon Démineur
  • La bande-son

Riche d’un concept solide ingénieusement renouvelé et d’un contenu de folie, Picross 3D se présente comme un compagnon de choix pour faire passer les quarts d’heure dans le bus. HAL Laboratory s’est attaqué avec brio à la formule que Nintendo confiait traditionnellement à Jupiter, et si je ne vendrais pas la peau du vieux Picross en deux dimensions pour ce nouveau-venu en 3D, force m’est d’avouer que celui-ci a les arguments qu’il faut pour se mettre dans la poche un bon nombre de joueurs, ou inversement.

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