Acclamé par l’ensemble des journaleux, le nouveau jeu tout en coton de la boule rose a vraiment fait sensation lors de son annonce. La raison ? Une esthétique tout en fil de laine du plus bel effet et un gameplay accompagnant celle-ci. Kirby Au Fil de l’Aventure mérite-il que l’on s’intéresse de nouveau à Kirby ?
Histoire
Fidèle à sa réputation, le scénario de ce Kirby ne vole pas bien haut.
Dans le merveilleux pays de Dreamland, Kirby, qui souhaitait faire taire son estomac, fût attiré par une tomate un peu bizarre. Une fois avalée, cette tomate se révéla être celle du grand sorcier Maillalenvers (à ne pas confondre avec l’abeille) qui, furieux, aspira Kirby dans sa dimension. Quand il s’y réveilla, il fût transformé en fil de laine, dans un monde de tissu. Ca c’est du bad trip !
Sitôt arrivé dans cette nouvelle contrée, Kirby sauva le Prince Ponpon d’un monstre qui le pourchassait. Ce dernier, attiré par le pouvoir de transformation de Kirby, lui demanda de l’aider à réparer le Royaume de Courtepointe, décousu par le sorcier Maillalenvers.
C’est sur cette excuse que le jeu vous lance dans un monde tout en laine, où votre but sera de parcourir les niveaux afin de rafistoler ce Royaume.
Si cette histoire n’a absolument rien d’original, c’est dans sa narration qu’elle se démarque. Souhaitant exploiter à fond l’univers de coutures enfantines et mignonnes, l’histoire vous sera contée par un narrateur, un peu comme ceux des cassettes audio de notre enfance. Celui qui met beaucoup d’intonations, mais qui parle calmement, qui prend des voix différentes pour faire parler les personnages, en oubliant pas le « pensa Kirby » typiquement narratif.
Là où Good-Feel, les développeurs du jeu, ont bien fait leur travail, c’est qu’ils ont réussi à nous imposer leur univers. Même si ce n’est plus de notre âge, ils réussissent à nous attendrir un peu et à nous faire entrer dans le Royaume de Courtepointe.
C’est au niveau de l’inspiration que ça bloque un peu pour ma part. Entre le fait d’avoir recyclé Dadidou et Metaknight, alors que d’autres méchants auraient pu être créés, je trouve que le grand sorcier ressemble beaucoup au méchant de Super Paper Mario. Le concept de base du jeu repose d’ailleurs un peu sur le même principe, sauf qu’au lieu de jouer avec le papier, vous manipulez des coutures.
Quand au Prince Ponpon, ce n’est qu’un Kirby bleu, avec une couronne et des gros sourcils. Ca fait un peu vieux jeu NES, où le deuxième joueur avait la même tronche que le héros, mais avec d’autres couleurs. M’enfin Kirby nous a déjà habitué à ça et c’est déjà bien que le Prince dispose de quelques éléments distinctifs.
Graphismes
Sans conteste le point fort du jeu. C’est d’ailleurs ce qui a fait sensation à l’E3, même pour la Wii.
Le Royaume de Courtepointe est tout en laine et le jeu jouera énormément là dessus. Quel plaisir de voir un jeu coloré avec tout plein de détails visuels à l’écran. Le travail artistique est incroyable et on est plongé à l’intérieur du jeu. Ce Kirby est beau, car pour une fois, les développeurs n’ont pas essayé de faire de la 3D qui donne un aspect de PS2 dégueulasse. Le jeu est tout en 2D et, comme c’est le cas pour Muramasa : The Demon Blade et Wario Land : The Shake Dimension, c’est impeccable, même sur télé HD.
J’ai vraiment l’impression d’être face à un film d’animation tout en laine, où les idées de mise en scène fusent dans tous les sens. Par exemple, les sables mouvants sont représentés par deux couches de fils jaunes et oranges, qui sont cousues par le haut en permanence et vous amène vers le bas au fur et à mesure de la broderie. Comme les écharpes de Mémé !
Le jeu est rempli d’éléments comme ça qui donnent une vie au niveau.
A ce propos, ce que j’ai également bien aimé, c’est la variété des niveaux. Par exemple, dans New Super Mario Bros. et New Super Mario Bros. Wii, chaque niveau d’un même monde se déroule avec un même décor. C’est lassant à la longue. Ici, ce n’est pas du tout le cas, chaque niveau vous amènera dans un lieu très différent du précédent. Le deuxième monde contient par exemple un volcan, une pyramide et une jungle de dino.
L’animation est, elle aussi, excellente, aussi bien dans les mouvements de Kirby et des ennemis, que dans la décomposition de la laine. Les boss sont eux aussi impressionnants, comme le piaf de feu que l’on a tous vu dans les vidéos. Un petit détail amusant, c’est que le fil de laine qui les compose s’effiloche au fur et à mesure que Kirby les découd.
Gameplay
Le gameplay de ce Kirby est on ne peut plus classique, à une exception près qu’il ne peut plus utiliser son fameux pouvoir. C’est d’ailleurs un point important à souligner : il n’y a aucune interaction avec la wiimote. Vous la tenez à l’horizontale et vous n’aurez à aucun moment besoin de la secouer. Bon, il y a quand même un passage qui l’utilise dans le jeu. C’est celui où il faut construire des rails en pointant la télécommande pour le train de Kirby. Le résultat est catastrophique.
Ce qui fait l’originalité d’un Kirby, c’est sa capacité à avaler les ennemis pour piquer leurs pouvoirs. Sauf que, dans cet épisode, comment voulez vous qu’il avale s’il n’a pas de ventre ? Kirby n’étant plus qu’un fil le laine, il ne se servira que d’un lasso fabriqué avec son corps pour découdre les ennemis, en faire des pelotes de laine, les balancer et en règle général, interagir avec tout ce qui l’entoure.
Cependant, les métamorphoses sont toujours présentes. Kirby se change en poids pour faire une charge au sol, se transforme en voiture pour aller plus vite et il peut même se découdre lui même pour passer à travers de petites entrées.
Ce n’est pas tout. Arrivé à environ trois quart du niveau, des fils de laine vous seront donnés pour vous changer en un véhicule jusqu’à la fin du niveau. Le plus marrant c’est la course de voitures, qui ressemble beaucoup aux chariots de Donkey Kong Country 2 : Diddy’s Kong-Quest, mais il y a aussi des taupes, des soucoupes volantes, etc…
En arrivant à la fin du niveau, l’écran de score vous donne une médaille en fonction du nombre de pierres précieuses récoltées. Encore une fois, l’inspiration ne va pas chercher bien loin, vu qu’en cas de chute ou de dommages corporels (ça fait très flic dit comme ça), Kirby perd un certain nombre de joyaux, qui s’éparpillent autour de lui. L’avantage par rapport à Sonic, c’est que le framerate ne chie pas, les joyaux ne clignotent pas et ils sont faciles à récupérer. Bon, sauf si vous tombez dans le vide bien entendu.
Le meilleur à mon sens, ce sont les interactions avec les décors. Grâce à son lasso Kirby peut modifier ce qui l’entoure, comme dans un Paper Mario, pour l’aider à avancer dans le niveau. Dé-zipper une braguette pour faire tomber les serviettes, faire tarzan en se balançant sur un bouton, resserrer un fil pour approcher une plate-forme…etc. Les possibilités sont nombreuses et se réinventent presque à chaque niveau.
D’ailleurs, la plupart des bonus cachés sont dissimulés derrière des autocollants que vous pouvez décoller avec un coup de lasso.
Si vous pensiez qu’un jeu en laine vous épargnerait les niveaux aquatiques, vous vous trompiez ! Tout un monde y est plus ou moins consacré d’ailleurs. Le contrôle du sous-marin Kirby à la croix vous ruinera le pouce. Heureusement qu’il y a la transformation en dauphin qui est plus agréable à contrôler. A ce propos, je me demande si les développeurs n’ont pas été forcés d’inclure de l’eau, vu qu’il n’y a presque pas d’interaction couturière, ou alors que du déjà vu.
Musiques et sons
Dans l’ensemble, la bande son est très bonne. Des musiques plutôt douces, mais qui ont juste assez de pêche pour accompagner l’action. Sauf pendant les niveaux aquatiques bien sûr.
C’est dans le même ton qu’un Yoshi’s Island, histoire de vous donner une idée, en beaucoup moins marquant évidemment.
Vous remarquerez qu’il y a aussi des remix des principaux thèmes de Kirby, comme Greens Green ou le jingle de fin de niveau. Elles sont toutes particulièrement jolies en mélangeant tout un tas d’instruments. Du très bon travail de ce côté là.
Attention néanmoins pour les allergiques aux fleurs, le Royaume de la Courtepointe se veut champêtre. Du Kirby puissance mille, qui condense toutes les émissions pour gosses depuis des générations. L’ambiance musicale vous le fait bien ressentir, donc je déconseille fortement ce jeu à tous les adultes qui s’y croient.
Revenons sur le point du doublage. J’ai lu sur bon nombre de sites que le doublage était très mauvais. Moi je ne trouve pas, c’est un style, narré comme une fable ou une histoire pour enfants et le doubleur fait très bien son travail, en reprenant les codes et intonations du genre. Bref, fuck les rageux comme on dit.
Un autre point positif au niveau du son. Pour une fois, les bruitages ne passent pas au dessus de la musique en provocant une cacophonie assourdissante. Ils sont en règle générale très discrets et je dirais même tous en coton.
Durée de vie
Ah, c’est là que ça va poser problème.
Comme tout Kirby qui se respecte, ou non, le jeu est très très court. Comptez sur moins d’une dizaine d’heures pour le terminer. Au moins, c’est équivalent aux jeux de cette génération.
Les plus optimistes pourront glaner quelques heures à la recherche des trésors et de la meilleure note, mais même moi je ne m’y suis pas attardé. Ne m’étant contenté que de fouiller rapidement les niveaux, je n’imagine même pas la durée de vie du jeu pour celui qui fonce en ligne droite.
D’ailleurs, pour ces derniers, vous n’avez pas besoin de payer pour accéder aux autres niveaux. Il y a juste un niveau bonus à choper en pétant le score chez un boss, mais rien de très intéressant et ce n’est pas la collecte des meubles pour votre studio qui vous occupera.
C’est dommage qu’un tel concept n’ait pas donné davantage de niveau au level design tortueux. Au contraire, dans ce Kirby, malgré les nombreuses interactions avec les décors, on fini par s’emmerder un peu tellement les niveaux sont longs. Et encore, c’est loin d’être un jeu tout plat comme Wario Land Wii, même s’il est vraiment très facile.
Pour ceux qui jouent à plusieurs, le deuxième joueur peut contrôler le prince Ponpon, qui est un clone de Kirby. Le jeu en devient encore plus ennuyeux vu que votre pote divise par deux les actions à faire à l’écran. En plus, vous devez faire en sorte d’y rester, dans cet écran. Bref, jouez-y seul, ça vaut mieux.
Les effets
Bon, fini les louanges. Parlons des effets provoqués par ce jeu.
L’aventure de Kirby est une drogue. Attention, je ne suis pas en train de partir dans le mauvais cliché du no-life accroc à son jeu en ligne. Je parle d’une vrai drogue, avec ses effets à court et moyen termes et à consommer de préférence seul.
De part ses qualités et son ambiance, il est facile de sombrer dans l’univers du jeu. C’est à la première vision du sourire de Kirby que débute un déclin progressif. Le jeu vous liquéfie le cerveau, petit à petit. Malgré le fait d’en avoir conscience, vous n’arrivez pas à en décrocher, tant le fait de courir sur un donut brodé vous donne envie de voir la suite.
Les niveaux s’enchaînent, la dégénérescence se poursuit et sans même prendre de plaisir. Vous galopez sur un fond de musique favorisant la perte des sens humains tels que l’ouïe et votre champ de vision se rétracte sur l’écran rose et lumineux.
Les plus chanceux s’apercevront de temps à autre qu’ils ont la bouche grande ouverte. Aussitôt refermée, vous perdez votre lucidité et replongez à l’état de légume.
Heureusement, le trip ne dure pas éternellement. Fatigué de jouer comme une merde tant votre cerveau n’arrive plus à suivre, vous vous sortez peu à peu de cet état de loque.
C’est ici que commencent les effets secondaires à moyen terme.
Le jeu fini par vous rendre agressif. Vous multipliez les dégâts et les mauvaises chutes, si bien que vous vous demandez pourquoi un jeu si simple vous donne autant de mal. Votre fierté de joueur prend le dessus et tout souvenir de votre état précédent disparaît. Vous êtes dans le déni et, sans remettre en cause vos capacités, vous éteignez brutalement la console, sans oublier d’insulter tout votre entourage, objets y compris.
Il n’existe malheureusement pas de traitements efficaces, encore heureux que le jeu ne dure pas trop longtemps. Cette expérience observée sur moi même me donne l’impression d’avoir joué au jeu lors d’une soirée alcoolisé. Je n’ai plus que de vagues souvenirs, un peu comme si je m’étais réveillé le matin en sachant un truc, mais sans savoir ni comment ni quand je l’ai appris.
En bref…
HISTOIRE : 11/20
Une bonne petite tomate hallucinogène et c’est parti pour l’aventure. Il y a au moins l’effort de la narration.
GAMEPLAY : 15/20
Kirby n’a strictement rien inventé, mais ça répond bien, c’est fluide et tout est rodé comme il faut.
GRAPHISMES : 18/20
Le jeu est magnifique, coloré, varié et avec une animation au poil. Ca fait vraiment plaisir à voir.
MUSIQUES et SONS : 15/20
De jolies musiques bien travaillées, bien qu’elles aient tendance à nous rendre complètement gogole.
DUREE DE VIE : 08/20
N’espérez pas y passer plus d’une semaine.
Note Finale : 14/20
Ce Kirby est un bon petit rafraîchissement, comme un bon jus de fruits après une longue randonnée. A consommer cependant avec modération.
Ses qualités sont indéniables, il est beau, plein d’idées, avec de jolies musiques et un bel univers. Par contre, le vieux Totowan avait bien raison, ce Kirby est à déconseiller aux plus de 7 ans, tant son univers est gamin au possible. M’enfin peut être que l’agressivité provoquée par le jeu a persisté chez notre vieux croûton.