Entre haine et amour, voici un épisode de la saga qui a su se démarquer du lot. Enfin quand on regarde la série avec un regard rétrospectif, on se rend compte que tous les épisodes se démarquent du lot… Mais celui-ci peut-être plus que d’autres. Déjà parce que l’histoire ne se passe pas à Hyrule, ne fait intervenir ni Ganon ni Zelda (ou alors très peu)… Mais aussi parce que le concept même de la saga (village, donjon, énigme, boss) est revu et corrigé au profit d’un monde vivant et particulièrement attachant.
Contes, mythes ou légendes ?
Depuis la parution de la chronologie officielle des épisodes de Zelda, il apparaît que la physique quantique joue un rôle important dans l’histoire puisque Ocarina of Time, tout à coup, se terminerait de trois façons différentes. Majora’s Mask serait alors (pour l’instant) le premier épisode de l’une des trois frises, celle selon laquelle Link aurait vaincu Ganon et serait revenu dans le passé. Au final, ce n’est pas bien différent de ce que tout le monde pensait jusqu’à présent puisque les similitudes entres Ocarina of Time et Majora’s Mask sont nombreuses…
Quoi que c’est discutable : imaginez un instant que Majora’s Mask soit doté de graphismes totalement différents, personne ne pourrait affirmer que ça se passe juste après Ocarina of Time… et de toute manière, d’ici à ce qu’un nouvel épisode vienne nous placer un Link adulte entre les deux jeux, tout ce qu’on aura dit jusqu’à présent sera faussé. Comme c’est drôle. On pourrait faire une thèse sur la question. Première partie : l’histoire de Zelda est tirée par les cheveux. Deuxième partie : les scénaristes se foutent de nous. Conclusion : elle sert vraiment à rien, cette chronologie.
En attendant, Majora’s Mask ne repose pas sur les vieux mythes d’Hyrule mais sur des contes pour enfants de Termina. Et là où c’est tiré par les cheveux, c’est que ces contes de grand-mère racontent des faits qui se sont passés quelques semaines auparavant :
Il était une fois un petit être qui se cherchait des amis. Mais il était tellement farceur que personne ne voulait de lui. Un jour, il parvint à tisser de solides liens d’amitié avec quatre géants. Mais les bêtises répétées du petit être décidèrent les géants à s’éloigner de lui. Comme pour le punir et lui donner le temps de réfléchir.
Il était une autre fois, un peuple très ancien qui pratiquait la magie. Une magie puissante et dangereuse qui causa bien des troubles dans le pays. A chacune de leurs cérémonie, un sorcier revêtait un masque magique, le masque de Majora. Mais on découvrit bien vite que le masque donnait des pouvoirs magiques démesurés et même considérés comme dangereux par le peuple en question. Celui-ci vint à disparaître (pour des raisons obscures) au bout d’un certain temps. Depuis lors, on dit que le masque de Majora vagabonderait dans le pays, soudoyant les esprits un peu faiblards pour parvenir à ses fins : trouver un pantin suffisamment débile qu’il pourrait contrôler pour détruire le moooooonde !
Ouaip.
Et sinon, il est devenu habituel, à Termina, de faire la teuf tous les ans pour le Carnaval. Tout le monde se déguise, la tour de l’horloge sonne puis bascule sur le côté, personne ne sait pourquoi mais on s’en fout, c’est la fête, hahaha !
Une histoire un peu gnan gnan
Alors qu’il avait quitté sa province natale sur le dos d’une pouliche de quelques mois, Link se retrouva bientôt perdu au beau milieu d’une forêt brumeuse qui lui était parfaitement inconnue. Désorienté, il ne put rien faire d’autre que regarder à droite ou à gauche. Et c’est là qu’il se rendit compte qu’il était observé. Par qui ? Il l’ignorait.
Continuant à essayer de voir qui le regardait depuis les branches des arbres, Link ne se rendit pas compte que deux petites fées s’approchaient de sa pouliche, Epona, la faisant se cabrer. Link tomba au sol et dans les vapes du même coup. C’est alors qu’apparut non loin de là, sur un fond musical rappelant des sonorités tribales venues du folklore Chinois, un skullkid portant fièrement un masque plutôt glauque.
N’écoutant que son instinct espiègle, le skullkid dépouilla Link d’un bel ocarina bleu, l’ocarina du temps que la princesse Zelda d’Hyrule lui avait confié en espérant le faire revenir un jour. Le son provoqué par l’ocarina fit sortir Link de sa torpeur. Skullkid, effrayé, bondit sur le dos d’Epona qui s’enfuit à toutes jambes. Link eut le réflexe de s’agripper à la jambe du skullkid pour tenter de le faire s’arrêter… pas bien longtemps.
Se relevant et s’époussetant, Link suivit la piste empruntée par Epona chevauchée par le skullkid, entra dans un arbre creux, tomba dans un puits qui lui parut sans fond et se retrouva finalement dans une petite fontaine. Le skullkid masqué l’y attendait non pas pour lui faire un câlin mais pour lui faire comprendre qu’il n’aimait pas être poursuivi. Afin de limiter les capacités de Link, le skullkid le transforma en… peste Mojo, petit animal insignifiant tout fait de paille et d’herbe. Affaibli, Link ne put rien faire pour empêcher le skullkid de s’enfuir, puisque même les petites fées parvinrent à l’empêcher d’avancer. L’une d’elles y mit tant d’ardeur qu’elle se retrouva enfermée avec Link dans la fontaine, incapable de suivre son pote skullkid et son frère Tael, l’autre petite fée.
Bon gré mal gré, la fée fut obligée de suivre Link et de l’aider dans sa quête. Elle s’appelait Taya, avait très mauvais caractère et n’avait pas spécialement envie d’être sympathique… Du moins pour l’instant. Car en suivant le chemin qui sortait de l’étrange forêt, Link et Taya se retrouvèrent dans la tour de l’horloge de Bourg Clocher. Ils y rencontrèrent un vendeur de masques ambulant, venu là pour le carnaval mais qui avait été dépouillé d’un masque… qui n’était pas à vendre. Conscient que Link avait été ensorcelé par ledit masque, le vendeur proposa au jeune garçon transformé en peste Mojo de l’aider à retrouver sa forme originelle s’il parvenait à récupérer l’objet qui lui avait été volé.
C’est ainsi que Link partit visiter Bourg Clocher avec ses vendeurs, ses jongleurs, les organisateurs du carnaval, le gang des Bombers, l’aubergiste amoureuse, le joueur de musique mélancolique, les danseuses qui ne savent pas danser, le banquier épileptique, le jeune garçon au masque de renard, la grand-mère en chaise roulante, la main qui sort des toilettes pour se plaindre qu’il n’y a plus de papier… et une lune à l’air colérique qui, selon le vieux de l’observatoire, menace de s’écraser sur Termina… dans 72 heures.
Juste pour le signaler parce que c’est tordant de rire : la version française de Majora’s Mask a été traduite par Julien Bardakoff et Jean-Baptiste Fleury. Le second vient donner un peu de normalité à tout ça (en supprimant quelques délires d’Ocarina of Time concernant les noms) pendant que l’autre, bien connu des joueurs Nintendo 64, nous gratifie à nouveau d’un jeu plus drôle en français que dans d’autres langues. En témoigne ce cuisant aveu d’échec face à la traduction d’un jeu de mots : un personnage dit « hohoho ! Mais pourquoi je ris ? Cette blague est nulle… peut-être que ça veut dire quelque chose dans une autre langue ? »… Magique !
Ocarina of Time bis ?
Je me souviens de l’époque où, armé de mon modem 56K qui faisait du bruit, je parcourais la toile, de IGN à un obscur dojo francophone, à la recherche d’informations sur « Zelda Gaiden » (Gaiden = héritage), le second épisode sur N64 qui aurait peut-être dû être un remake de A link to the Past ou bien une aventure totalement inédite dans l’univers de Ocarina of Time. Nombreux étaient ceux qui disaient qu’un bon Zelda, on devait l’attendre au moins 5 ou 6 ans avant de le voir venir.
Or ici c’est différent : pour économiser les 4 années de recherche qui ont conduit à Ocarina of Time, l’équipe EAD de Nintendo sous la coupe du tout jeune Eiji Aonuma a décidé de reprendre à peu près 90% du travail et d’ajouter de nouveaux ingrédients. On garde donc le moteur graphique, le système de jeu (la fameuse visée Z révolutionnaire) et on réfléchit à ce qu’on va bien pouvoir en faire.
Les premières images du jeu voulaient absolument différencier ce Zelda Gaiden de son illustre prédécesseur. On a donc vu Link apparaître dans des environnements aux formes et aux couleurs qui ne rappelaient en rien Ocarina of Time. On vit bientôt apparaître des personnages déjà connus. La jeune fermière du village Cocorico, le chef des travaux, le papy du bourg d’Hyrule, la mère de l’apothicaire et même Malon enfant et adulte l’une à côté de l’autre. C’en était incompréhensible.
Bientôt, on apprit que ce n’est pas tout à fait une suite, du moins que ça ne se passe pas aux mêmes endroits et que les personnages rencontrés ne sont pas les mêmes. De nouvelles images nous montrent un Link aux traits retravaillés. On nous annonce que le jeu ne sera jouable qu’avec l’extension mémoire de la N64.
Au final, on se retrouve avec un jeu plus grand, plus vaste, plus varié, plus détaillé. Les forêts ne sont plus des textures aplaties contre les murs mais bien des troncs au beau milieu des champs, on nous emmène au bord de la mer avec vue sur une île lointaine, l’environnement bouge, des formes biscornues viennent donner de faux airs de Tim Burton à l’univers. Graphiquement, on s’approche vraiment de ce que la Nintendo 64 peut faire de mieux. Et pourtant ça semble si proche de ce qu’elle faisait quelques années auparavant sans Expansion Pak.
Le temps file en temps réel, même dans des endroits où ça n’avait pas été fait dans Ocarina of Time (village, maisons etc.). La luminosité et les couleurs changent au fil des heures, les personnages se déplacent tous en suivant des parcours précis et chronométrés. Si vous vouliez les voir, il fallait être là à l’heure et pis c’est tout.
Les anciens PNJ sont recyclés, relookés pour certains et viennent tenir un rôle totalement différent. La jeune fermière devient Anju l’aubergiste, Ingo devient maître de cérémonie, le marchand du stand de tir devient guide touristique, le marathonien devient facteur… Les Zoras deviennent chanteurs de cabaret, même les voleuses Gérudo sont reconverties en pirates et relookées pour l’occasion. Et bien d’autres personnages font leur apparition. Ce qui paraissait à l’origine incohérent devient soudain beaucoup plus vivant. Autour de ce fameux Bourg Clocher, tout le monde s’active, prépare le carnaval à sa façon, ou pas.
Mais au-delà de tout aspect graphique, ce qui va vraiment différencier Majora’s Mask de Ocarina of Time, c’est le système de jeu dans son ensemble.
Seulement 4 donjons
Si vous venez de terminer Twilight Princess, 4 donjons ça doit vous sembler être une blague. Un peu moins si vous venez de terminer Skyward Sword, mais celui-là il compte pas. Nous sommes ici pour parler de choses sérieuses, voyez-vous ? Récapitulons, il y en avait 9 dans le premier opus, 7 dans les suivants… Non, ce n’est pas possible !
Hé bien si !
Magie !!
Le jeu ne repose plus sur l’alternance pourtant si chère à la saga des villages et des donjons. Ils en ont mis 4 pour faire joli, mais ce n’est vraiment pas le plus important. A dire vrai, ils auraient même pu ne pas en mettre… Mais ça aurait été se priver de 4 des meilleurs donjons de la saga ainsi que de 4 combats dantesques contre des colosses qu’on n’aurait jamais pensé voir sur la petite console noire.
L’essence du jeu repose donc sur les relations entretenues avec les personnages non jouables. Lors de votre première visite à Termina, vous ne vous en rendrez pas bien compte. Ou peut-être par bribes. En allant rendre visite à tel personnage (parce que c’est votre quête et le temps vous est compté), vous rencontrerez un individu louche qui a besoin d’aide. Pas le temps de l’aider, mais ça vous fend le cœur de ne rien pouvoir faire pour lui. Puis quand la fin de la 72ème heure aura sonné, que la lune se sera écrasée sur le monde et que, dans un dernier soupir, vous aurez joué le chant du temps dans votre ocarina nouvellement retrouvé, vous reviendrez au point de départ… enfin pas tout à fait puisque vous aurez appris un certain nombre de choses lors de votre premier voyage.
Et dès le deuxième, on pourra vous remettre un livre dans lequel seront consignés tous les fais et gestes des personnes que vous rencontrerez et qu’il vous faudra aider. C’est Facebook Google+ avant l’heure.
Pourquoi aider ces gens, me direz-vous ? Hé bien pour obtenir des informations sur l’histoire (qui ne vous sera pas racontée autrement), pour obtenir des objets, des armes, des rubis et… des masques.
Les masques de Majora’s Mask
Le titre du jeu évoque un masque, un seul, que vous ne possèderez pas. Mais il y en a 24 autres à posséder. Ces masques se divisent en plusieurs catégories :
- Les masques magiques qui transforment Link en quelqu’un d’autre
- Les masques qui interagissent avec l’environnement
- Les masques qui interagissent avec les personnages
Sans vouloir faire une liste exhaustive, vous obtiendrez au cours de votre aventure des masques qui vous transformeront en peste Mojo, en Goron ou en Zora, des masques qui vous permettront de parler avec des renards, des masques qui vous permettront de faire grandir les poussins, des masques qui vous permettront de ne pas vous endormir quand Mamie vous racontera ses histoires à dormir debout… Même un masque qui peut redonner le sourire au Maire du village, c’est dire !
Porter un masque devant les habitants de Bourg Clocher peut modifier leur comportement, ou en tout cas leur attitude vis-à-vis de vous. Il y en a qui ne vous parleront peut-être pas si vous portez tel ou tel masque, d’autres qui seront plus bavards en portant tel autre masque. Et surtout, vous avez toute une ribambelle de quêtes secondaires à accomplir soit pour le plaisir de voyager dans ce jeu merveilleux, soit pour compléter votre équipement.
En effet, porter un masque peut vous aider à atteindre tel objectif qui vous permet de récupérer un nouveau masque ou un nouveau flacon ou un nouveau fragment de cœur. Et c’est là que c’est important parce que les fragments de cœur, vous devrez en trouver beaucoup vu qu’il n’y a que 4 donjons, que vous commencez avec 3 cœurs (comme dans tout BON Zelda) et que le boss final est certainement plus violent que tous les Ganons que vous avez rencontrés jusqu’à présent.
Il y a un autre masque, celui que vous ne pourrez posséder qu’en ayant obtenu tous les autres, qui a fait fureur à l’époque. Le masque d’Oni-Link plus connu chez nous comme le masque de la puissance des fées. Un masque qui ne fonctionne qu’en présence d’un boss et qui transforme notre petit Link tout mignon en guerrier sombre, violent et particulièrement fort… à tel point que les boss ne peuvent rien contre lui. C’est amusant parce que ce masque a été une sorte d’incarnation des fantasmes Darklinkiens de beaucoup de joueurs. Et si Link était méchant, violent, s’il faisait du mal aux animaux et aux petits enfants… Tout ça parce qu’il a des tatouages sur le visage et des cheveux gris. Tsss !
Il est à noter que certains masques permettent de « tricher » ou en tout cas de faciliter votre progression dans votre quête. Un peu à l’image des Super Guides que Nintendo ajoute désormais dans chacun de ses jeux, vous n’êtes pas obligé de les utiliser. Mais il faut reconnaître que certaines quêtes sont assez tordues et pourraient vous demander pas mal de temps de recherche si vous ne voyez pas le bon truc au bon moment. Je pense notamment à une petite fée perdue qu’il faut trouver derrière un plafond invisible dans une pièce qu’on ne visite jamais… Pfiouh !
Elément essentiel du gameplay, les masques font donc ici une apparition surprenante et originale… qui n’a pas donné de suite. C’est ce qui confère à Majora’s Mask son côté unique. Mais ça prive les épisodes suivants d’un défilé d’idées géniales. Pour ma part, je préfère les Zelda avec tout plein de (vrais) donjons dedans et plein de vie autour. J’attends donc avec impatience un épisode qui saura mettre à profit le concept de Majora’s Mask en parallèle d’une succession de temples et autres grottes bien poisseuses, gnark !
Maestros avec maestria
Ocarina of Time est la dernière bande originale de jeu sur laquelle Koji Kondo aura travaillé seul. Majora’s Mask est, en toute logique, le premier Zelda sur lequel Koji Kondo n’est pas seul à travailler. Toru Minegishi fait son entrée en fanfare chez Nintendo en coordonnant la musique (et accessoirement en composant 3 des 112 morceaux que contient le jeu). En gros, il se charge des relations aux développeurs pour savoir où mettre quel type de musique, ce qui laisse davantage de temps à Kondo pour composer.
L’avantage de ce travail en binôme, c’est que le nombre de musiques dans le jeu double carrément. Et c’est sans compter les thèmes repris directement de Ocarina of Time.
Le désavantage, c’est que ça ne donne pas suite au travail effectué dans Ocarina of Time sur l’accord entre la musique et le gameplay, comme ce fut le cas dans la Plaine d’Hyrule et ses 12 phrases contextuelles. On poursuivra ce travail dans The Wind Waker.
Chose notable et pourtant contestable : le thème Overworld est présent. Grand absent d’Ocarina of Time, le voilà arrivé. Cependant, c’est dommage parce qu’il est un peu bâclé et… bah le jeu ne se passe pas à Hyrule, quoi ^^
Mais les autres musiques, houlàlà ! Pour la première fois dans un Zelda, on entend un thème récurrent, celui du masque de Majora. Mais en fait il y a trois thèmes récurrents qui se mélangent parfois. Le thème de Bourg Clocher (reprise libérée du Bourg d’Hyrule), que l’on retrouve dans le générique et qui se décline en trois variations en fonction du jour. Et le thème des terres ravagées que l’on entend en arrivant dans une zone qu’on n’a pas encore libérée de l’emprise de sa malédiction.
D’autres morceaux sont même devenus mémorables, comme la musique du temple de Pierre (l’un des meilleurs donjons de la saga, soit dit en passant), celle du château d’Ikana, de la forteresse des pirates, de la balade en calèche… Dans le théâtre des Zora, on entend les musiciens s’entraîner sur des musiques des premiers épisodes (game over de Zelda 1 au piano, underworld de Zelda 1 à la basse, cavernes de Zelda 3 à la batterie ^^) et ça se finit par un concert jazzy dont la mélodie (pourtant pas géniale) a été reprise un nombre incalculable de fois sur les CD de remix plus ou moins officiels.
Les musiques du jeu ont quelque chose d’assez spécial qui fait qu’on les reconnaît du premier coup d’oreille. Ca s’est vérifié lors des blindtests qui ont été organisés sur le forum. Les musiques des temples et des endroits glauques commencent toutes par quelque chose d’aérien, un souffle, le vent qui s’engouffre dans les tuyaux… Et les autres musiques ont ce petit quelque chose venu d’Asie Centrale que l’on associe forcément au masque de Majora puisque le thème principal du jeu est basé sur ces sonorités.
Pour ce qui est des musiques, reste à traiter la question des morceaux joués à l’Ocarina… ou un autre instrument si vous portez un masque. Hormis quelques reprises de circonstances issues d’Ocarina of Time (chant du temps…), les morceaux sont tout nouveaux et correspondent à de nouvelles actions. On retrouve deux catégories de morceaux : ceux que l’on joue souvent et qui affectent principalement l’environnement et ceux qui sont davantage liés aux donjons et qui s’apprennent au cours d’une jolie cinématique polyphonique. Pour ma part, je trouve tous ces morceaux, dans leur ensemble, moins envoûtants que leurs cousins d’Hyrule. Joli mais sans plus. Et puis bon. Y’a pas le Boléro du Feu, quoi.
Pour les sons, ce sont les mêmes que dans Ocarina of Time, donc parfaits.
Là où ça change, c’est dans l’apparition des voix. Enfin pas vraiment des voix, on reste dans Zelda quand même, hein ! Plutôt des exclamations. De trois ou quatre enregistrements dans Ocarina of Time, on passe ici à quatre ou cinq enregistrements… par personnage ! Selon leur humeur, le moment de la journée, la façon de les aborder… les personnages pousseront un rire, un râle ou un cri différent. Cela traduit complètement le côté vivant qui a été recherché dans ce jeu. Et ça fait mouche, même plusieurs années après !
3 jours, c’est long ?
Reste à traiter de la durée de vie de ce Majora’s Mask.
Honnêtement, avec seulement 4 donjons, un bon joueur qui n’a pas peur d’aller à la fin avec à peine sept cœurs de vie et aucune potion peut terminer le jeu assez rapidement, ce n’est qu’une question d’heures. Cependant, même les meilleurs joueurs de Ocarina of Time vont en avoir pour leur argent. Et ce pour plusieurs raisons.
La première, c’est que Majora’s Mask remet vraiment à plat ce qui nous semblait pourtant acquis avec Ocarina of Time. La première minute de jeu y ressemble très fortement, on se croit doué à voir Link faire des saltos pour passer de plate-forme en plate-forme alors que l’on poursuit le skullkid dans la forêt. Mais passée cette première minute extatique, tout ce que vous saviez devient faux, tout ce que vous aviez appris ne vous sert plus à rien.
Manier Link est peut-être facile pour vous, il n’en sera pas de même pour manier Link Mojo ou Link Goron ou Link Zora. Car il ne s’agit vraiment pas d’un simple changement de skin pour faire comme au bal masqué, mais bien d’un profond changement de gameplay. Apprendre à nager dans l’océan, à faire des roulé-boulé dans la montagne ou à voler à l’aide de tournesols ne se fait pas instinctivement. Et si vous préférerez certainement manier l’épée pour venir à bout des quatre malheureux donjons que propose le jeu, je vous rappelle qu’ils ne représentent pas la moitié de ce qui vous attend.
Deuxième raison, le temps qui passe. Bien sûr, vous apprendrez (si vous le voulez) que le temps peut s’accélérer ou ralentir à volonté pour vous permettre de faire ce que vous avez à faire dans le temps imparti. Mais il n’est pas dit que vous puissiez tout faire d’un seul coup. Je prends un exemple. Pour visiter le premier donjon, il y a toute une ribambelle de quêtes à effectuer auparavant. Si vous vous débrouillez bien, vous parviendrez à les faire dans les 3 jours impartis et à débloquer l’entrée du donjon. Il sera alors temps de revenir trois jours en arrière… et non pas de tout recommencer, mais d’utiliser ce que vous avez appris pour accéder directement au donjon. C’est plus prudent. 72 heures dans le jeu, c’est 72 minutes dans la vraie vie (celle où ça fait mal quand on tombe d’une falaise). Ca passe vite.
Du coup, vous vous surprendrez, même si vous n’en avez pas envie, à flâner, à faire des quêtes annexes, juste parce que ça vous semble peu judicieux d’entrer dans un donjon au vu du temps qu’il vous reste.
Troisième raison, l’univers est tellement charmant, enchanteur, les personnages sont tellement attachants que vous finirez toujours par avoir envie de les aider. Quand durant la moitié de votre temps de jeu vous verrez Romani déprimer totalement le troisième jour, vous aurez fatalement envie de savoir pourquoi. D’autant plus que Romani ressemble comme deux gouttes d’eau à Malon, votre amour de jeunesse dans Ocarina of Time. Et quand vous comprendrez pourquoi, ça vous donnera envie d’aller encore et toujours plus loin… juste pour récupérer un petit masque de rien du tout, mais un petit masque qui vous donne accès à un endroit que vous n’aviez jusqu’alors jamais visité.
Quatrième raison, vous qui êtes des adeptes du 100%, pensez bien qu’il doit y avoir 50 et quelques quarts de cœur à récupérer dans le jeu. Plus difficile que d’avoir tous les masques, d’autant plus que certains se trouvent dans des endroits qu’on ne pouvait pas atteindre dans Ocarina of Time.
Alors dites vous bien que ce jeu va vous coller à votre canapé pendant de bien longues heures, quelle que soit la raison qui vous a amené vers les jeux vidéo. Chacun va en prendre pour son grade, surtout les adeptes du 100%. Les fans qui se contentent de suivre l’histoire pour voir la fin vont avoir envie de faire le tour de la question, car la trame principale ne se suffit pas à elle-même.
Dernière raison : ce Zelda est tellement Zelda et en même temps tellement différent de Zelda que… bah on a envie de se le refaire ! Peut-être pas aussi maladivement qu’un A link to the Past ou un Ocarina of Time, mais quand même. Il a quelque chose, ce putain de jeu. Même quand on ne l’aime pas on a envie de se le refaire. Rhaaaaaaaaaaaaaa !
En bref…
Je dois admettre que j’ai mis du temps avant d’apprécier la saveur de Majora’s Mask. Un peu déçu au départ parce qu’il n’apportait pas ce qu’il manquait à Ocarina of Time, c’est après l’avoir fini entièrement que j’ai compris qu’il fallait l’apprécier différemment. Son côté décalé, son humour spécial, son atmosphère sombre… tout ce qui est ingénieux et qui définit ce jeu en long, en large et en travers.
Histoire:
Nan, l’histoire est franchement bof, y’a pas à chier. C’est gnan gnan, la fin est vraiment pas terrible (je le dis souvent, mais on dirait la fin de Duck Tales 2 sur NES), ça sent le truc fait à la va vite là où d’autres jeux savent nous surprendre. Ca manque franchement de saveur. Il n’y a que l’univers pour relever le niveau.
Graphismes :
Ocarina of Time en plus joli ? Oui et non, c’est différent, les choix esthétiques ne sont pas les mêmes, mais c’est beaucoup plus varié et beaucoup plus coloré… tout en étant plus sombre. Une bien belle alchimie qui manque malgré tout d’effets de lumière.
Musiques et sons :
Beaucoup de musiques mais peu de mémorables. Les chants joués à l’ocarina ne sont pas franchement terribles… Il manque le boléro du feu, quoi ^^
Gameplay :
Une jouabilité déjà parfaite et déjà éprouvée qui se voit accompagnée d’un système de jeu audacieux et ambitieux qui ne démontre aucun défaut.
Durée de vie :
En tant que fan puriste à la con des trames traditionnelles de Zelda, seulement 4 donjons ça passe un peu mal. Mais l’univers riche et adorable donne envie de s’y perdre, d’aider, de contribuer… Majora’s Mask me donne un peu l’impression d’être un avant-goût d’Animal Crossing… auquel il manque selon moi un but à atteindre comme par exemple sauver le monde.
Verdict
Parfois je me demande s’il n’aurait pas été plus à son aise sur une console comme la GameCube. Ca lui aurait permis d’être encore plus grandiose et je crois que c’est ce qui fait défaut à cet épisode Nintendo 64. Le concept est excellent, tout l’aspect technique est maîtrisé avec brio. Mais la console montre aussi ses limites. L’univers riche et vivant souffre finalement des faibles capacités d’affichage de la N64. Avec quelques Mo de plus, il aurait certainement été possible d’étendre le concept de Bourg Clocher et ses nombreuses quêtes annexes à tout Termina, de la Plaine à la plage en passant par la montagne. Des lieux qui vont sembler bien déserts une fois qu’on sera sorti des murs de la ville.
Pour le reste, Majora’s Mask peut rester graver dans vos mémoires comme l’épisode qui propose les donjons les plus tordus, les boss les plus titanesques (Volvagia peut retourner dans son couffin) et les quêtes annexes les plus développées. Dit autrement, Majora’s Mask nous permet de savourer avec bonheur ce que ses prédécesseurs ont initié et que ses successeurs n’ont pas su reprendre à leur compte. C’est d’autant plus frustrant de se taper des Twilight Princess et des Skyward Sword un peu décevants quand on sait que Nintendo a fait Majora’s Mask.
Incontournable.