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Devil’s Third

Le

par

Annoncé en 2010 pour connaitre ensuite une longue série de péripéties bien malheureuses, Devil’s Third a été attendu par une poignée d’excités durant toutes ces années. La raison ? Il s’agit du premier projet développé par Tomonobu Itagaki, le legendary creator, suite à son départ de Tecmo et avec l’aide d’anciens collègues qui l’ont suivi. Après un Ninja Gaiden II exceptionnel sorti en 2008, ce fut une longue traversée du désert pour Vahalla Games Studio qui essuya la faillite de son éditeur THQ, ainsi que la perte de son moteur graphique qui était celui de Darksiders. Si les fans furent rassurés de voir que le projet et son auteur n’avaient pas été enterrés mais sauvés par Nintendo, que devient un jeu de ce genre qui va de galères en galères et est développé sans que le studio ne fasse entrer un seul yen de l’extérieur durant sept ans ? L’heure est à l’indulgence…

From Russia with guns

Bienvenue dans le monde de Devil’s Third ! Si vous avez déjà joué à un jeu Ninja Gaiden sur consoles HD, vous devez vous souvenir que l’action était mise en scène par un scénario nanardesque au possible, comme ce moment où Ryu Hayabusa affronte, au sommet du mont Fuji, le chef du clan ninja adverse revenu des enfers pour le vaincre. En jetant un œil à la jaquette de Devil’s Third, vous vous êtes donc naturellement dit que le ton serait à peu près le même.

Vous incarnez donc un ancien terroriste russe nommé Ivan et surnommé « Le Terrible ». Après avoir quitté son groupe, il se rend à l’ONU qui le colle dans les sous-sols de Guantánamo avec une peine de 850 ans. Néanmoins, dans le plus grand secret, il continue d’aller sur le terrain en exécutant des missions pour l’Amérique, ce qui lui permet de disposer d’une cellule de luxe. Le jeu commence donc par une action de grande envergure de la part de vos anciens collègues qui font exploser plusieurs satellites nucléaires, entraînant une réaction en chaîne et privant ainsi le monde d’électricité. Plusieurs nations s’écroulent et la loi martiale est instaurée aux USA. Votre mission sera donc de traquer les anciens potes d’Ivan grâce à votre petite escouade Delta, seuls contre des millions de soldats recrutés par l’ennemi.
L’action vous mènera ainsi aux quatre coins du monde, en rencontrant les anciens collègues d’Ivan qui sont tous de véritables clichés sur pattes. L’africain tribal prônant les valeurs de l’arme blanche avec son béret rouge, la pute japonaise qui se bat en petite tenue et avec des seins aussi gros que sa tête, la petite sniper frêle, l’espèce de Daesh japonais dégueulasse… Je ne les mentionnerai pas tous. Votre personnage n’est pas épargné pour autant, bien qu’il soit le fruit d’une mondialisation peu commune : il est russe, couvert de tatouages japonais, parle anglais et maîtrise un art martial qui fut enseigné durant la Seconde Guerre Mondiale. Cela ne l’empêche pas de toujours garder ses Ray-Ban sur le nez (à l’image d’Itagaki d’ailleurs), d’être torse nu sur le champ de bataille et de sortir sa flasque pour s’en jeter un petit dès que vous délaissez la manette. Il parle très peu et dispose d’un fort accent russe renforçant sa virilité, comme si son statut de mâle alpha ne suffisait pas.

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Et pourtant, ça marche ! Ivan dégage quelque chose. Cela ressemble à du charisme, pour peu que vous soyez sensibles aux icônes du cinéma d’action comme ce bon vieux JCVD, ou Rambo, qui ne se cachent pas derrière des armures et encaissent les rafales grâce à leurs pectoraux saillants. J’aurais aimé qu’il parle un peu plus et que son jeu soit meilleur car malheureusement, au vu des dégâts, notre pauvre tatoué est voué à connaitre la même carrière que son compatriote Ivan Drago.

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From RDA with no money

Si de nombreux jeux japonais fantasment l’image de l’Amérique, bien peu sont ceux qui donnent le beau rôle aux ruskov. Déjà parce que la guerre froide existe toujours pour une grande partie des scénaristes à travers le monde et aussi parce que les japonais n’ont jamais réussi à signer le traité de paix mettant fin au conflit avec les russes durant la Seconde Guerre mondiale ! Tout ça pour une histoires d’îles. La nouvelle machine à tuer serait donc originaire de cette immense contrée connue pour son froid, sa vodka et leur comportement peu orthodoxe. Il est ici japonisé pour lui donner un sens de l’honneur et américanisé pour son sens de la justice et du devoir.

Le rapport à la Russie n’est pourtant pas exclusif au héros du jeu et les mauvaises langues diront que le jeu a été développé dans un pays de l’Europe de l’Est post-URSS, ce qui n’est pas très gentil mais un peu vrai.
Le premier constat que l’on observe en jouant à Devil’s Third c’est que le jeu est loin de faire honneur à son support, habitué à nous faire tourner de propres et splendides Mario Kart 8 et aux Bayonetta en 60 fps. Il est vieux, daté et développé grâce à un Unreal Engine auquel on aurait enlevé toutes les options de lumières et de niveau de détail qui nous avaient impressionné dans les premiers Gears of War. L’ensemble des décors du jeu font carton, comme c’était souvent le cas sur Wii et le framerate chute drastiquement dès que l’aire du jeu élargit son éternel couloir. Pourtant, la volonté était là. Le personnage principal est plutôt bien réussi et certains plans sont très agréables à l’œil, le jeu fait preuve d’une certaine ambition qui n’a malheureusement pas pu être concrétisée à cause des divers problèmes que j’ai mentionné dans l’intro. C’est dommage et ça ne s’arrête pas là, la suite est bien pire.

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Pour Tomonobu Itagaki, rien n’a vraiment changé depuis 2008 et la sortie de son dernier jeu Tecmo, Ninja Gaiden II. Devil’s Third vous propose exactement la même expérience visuelle, mais à s’embourber dans son développement depuis sept longues années, le legendary creator a, à mon grand regret, perdu la main sur ce qui faisait de lui un game designer de renom. Ayant basé toute sa philosophie sur les sensations données au joueur lors de sa partie, j’ai encore le souvenir de celles que j’ai ressenties sur les Ninja Gaiden. L’intensité des combat, le bruit des épées découpant des membres ou croisant le fer lors d’un contre de l’adversaire, la vitesse des joutes contre des dizaines d’ennemis qu’il fallait gérer en même temps, etc. Je demande encore aujourd’hui cette exigence dans les sensations que doivent me procurer un jeu et aucun autre beat’em all ne me l’a donné depuis, pas même l’excellent Bayonetta. C’est pour cette raison que j’ai attendu Devil’s Third et malheureusement, je ne retrouve rien.
Pourtant, visuellement, tout est là. Les ennemis explosent lorsque vous les criblez de balles et les combats à l’arme blanche sont tout aussi sanguinaires, mais il manque quelque chose, au niveau visuel et sonore, qui l’exclut des Call of, Uncharted et autres Gears of War que Devil’s Third imite. De même avec les nombreuses armes allant de la hache au couteau et du katana à la masse que vous trouverez sur votre route, ça ne fonctionne pas. Ivan est un véritable tank à côté de Ryu Hayabusa et il dispose d’une palette de coups aussi pauvre que peu technique qui fait honte au ninja. C’est simple, le concept du jeu lui même est bancal. En mélangeant jeu de tir TPS/FPS et combats beat’em all, le gameplay n’a tout simplement pas su s’adapter à la seconde catégorie : seuls deux combos sont possibles, celui attribué au bouton de frappe rapide et l’autre de frappe lourde. Idem pour la course, qui s’active en cliquant sur le stick tout en le poussant, combinaison commune dans les FPS où l’on court généralement droit devant. L’action est ici très difficilement réalisable en combat lorsqu’on veut vite prendre ses distances sur le côté par exemple. Le principal problème d’Ivan restera sa vitesse, incompatible avec la définition d’un bon beat’em all à la japonaise, tant notre ruskov semble s’être calqué sur Marcus Fénix de Gears of War.

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Il restera donc la progression façon gros pétard grâce à une jouabilité on ne peut plus classique mais efficace car ayant fait ses preuves. Devil’s Third possédant un système de couverture, vous n’irez jamais vous jeter, le katana à la main, en courant dans le camp ennemi et, logiquement, vous avez tout intérêt à dégommer de loin les pauvres gugus qui tenteront une percée à la dure dans votre tranchée. Les ennemis sont d’ailleurs particulièrement idiots, comme pour coller au reste du jeu. Ils ne bougent pas de leur position, du moins lorsqu’ils se cachent et disposent de pauvres animations. Malheureusement, votre pétard, aussi gros soit-il, ne sera d’aucune utilité face aux boss, qui réagissent aux armes des vrais guerriers. Ces derniers sont de véritables purges, mixant à la fois frustration et ennui, répétant les mêmes coups ad nauseam et vous faisant de même. Ils sont coriaces, mais peu intéressants, juste frustrants.

Avec un concept maladroit et mal exploité, Devil’s Third est au final très classique dans sa progression et ne propose rien de plus que les innombrables clones de Gears of War. Avec un budget bien moindre que le jeu d’Epic Games, il se tape en plus des animations très rigides le rapprochant davantage de votre frigidaire que d’un Nathan Drake bien qu’Ivan aime également grimper. De même, Vanquish a également fait écho dans Devil’s Third avec la fameuse glissade, à la différence qu’elle est ici complètement dénuée de sens car il est impossible de viser en même temps, en plus d’être laborieuse à effectuer. Le tableau n’est pas très reluisant et j’en suis le premier attristé… Pourtant, je continue ma partie, je joue, mais peut-être que je cherche plus qu’autre chose.

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From URSS with a lot of komrades

Fait improbable, preuve d’un Nintendo finalement peu impliqué, le mode online finira d’ici peu en freemium sur PC et, de ce fait, il a été construit pour coller à ce fonctionnement.
Après avoir conçu votre avatar et choisi votre pétard, vous pourrez prendre part à des bagarres impliquant jusqu’à seize lascars. Classique en soit, le mode est néanmoins construit sur un système récompensant ceux qui s’investissent le plus, à la différence des jeux Nintendo où tout le monde part sur un pied d’égalité. Ici, les joueurs les plus forts disposent de bien meilleures armes que vous, pauvre type avec sa barre à mine et son Ak-47 soldé, rendant votre progression frustrante et très peu amusante. En parcourant les cartes en courant comme un débile, vous vous ferez très souvent descendre à 3km de distance par un des deux clichés les plus présents des jeux à personnalisation d’avatars : le marine américain impersonnel tellement il est couvert de partout (« lol, je suis un soldat, c’est trop classe ») ou la bombasse genre Scarlett Johansson dans Avengers (la femme fatale, le syndrome Tomb Raider). Après avoir constaté que le matchmaking a largement joué en votre défaveur, vous serez découragé de voir qu’être mort 10 fois et n’avoir remporté que 100 points parce qu’une de vos balles perdues aura ricoché sur un mur pour finir dans un type ne fait absolument pas grimper votre expérience.

Alors oui, certes, je ne sais pas viser ! Il est donc possible que j’exagère légèrement, mais ce n’est pas le seul problème de Devil’s Third, dont les joutes online sont chiantes au possible. Après une centaine d’heures sur Splatoon, difficile de ne pas pas lâcher un bâillement ou deux, de même pour les quelques FPS online que j’ai pu faire durant mes heures sombres, qui étaient bien plus offensifs, amusants et dynamiques. Heureusement, des modes plus délires sont présents, comme ceux de la chasse aux poules et des fruits. C’est rigolo et décalé.

Une fois un certain niveau atteint, vous débloquez le fameux mode des clans, que je trouve pour ma part trop inutilement complexe. En rejoignant un camp, vous combattez ainsi face à d’autres par les armes, mais également par la diplomatie si vous souhaitez ne pas vous amuser. Évidemment, la construction freemium oblige, n’espérez pas vaincre un siège ennemi si celui-ci est composé de brutes riches comme Picsou qui ont bien pris le temps de fortifier leur camp comme il se doit.

Comme pour Splatoon, le online d’aujourd’hui n’est pas encore complet, d’autres modes de jeu arriveront dans les semaines à venir.

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En bref…

J’aime :

  • Un gros nanar
  • C’est con, ça défoule

J’aime pas :

  • C’est moche
  • Gameplay inadapté au beat’em all
  • Les ennemis débiles (Third)
  • Mauvaises sensations de jeu
  • Contrôler un tank mal animé
  • Les temps de chargements…
  • Le mode online chiant

Attendu depuis sept ans, Devil’s Third est au final raté sur tous les points. Il a pourtant essayé et ça se sent, mais ça ne fonctionne pas. Entre les problèmes techniques et ceux, plus profonds, du concept bancal de l’hybride FPS/Beat’em all, le jeu d’Itagaki est redondant, peu amusant et fait surtout honte à ses précédentes productions du temps de Tecmo où l’argent était vraisemblablement plus présent pour se donner les moyens de ses ambitions. Dommage.

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