Nous mettons nos archives à disposition mais la mise en page n’est pas encore corrigée

Tests : NESGBSNESN64GBANGCDSWii3DSWii U

L’histoire de Mega man : La genèse

Le

par

Ayez le malheur d’écrire « Inafune, le papa de Mega Man » sur internet pour recevoir un torrent d’insultes (sûrement un coup du gang « Au temps pour moi »). Mais si on sait du coup à peu près tous qu’Inafune n’est pas le vrai géniteur de la saga, peu de monde connaît la véritable histoire… Voici donc un petit article qui compile tout ce que l’on sait de la naissance de Mega Man.

Attention : La grande majorité des faits relatés ici proviennent d’interviews accordées par Inafune lui-même. Il n’est peut-être pas le créateur de la mascotte de Capcom mais il est le seul qui daigne en parler. Il m’a été impossible de croiser plusieurs sources pour vérifier ce qui est dit dans ces lignes.

Génèse

Nous sommes à la fin de l’année 1986. Capcom (pour Capsule Computers), une jeune société japonaise créée en 1981, est un poids lourd de l’arcade depuis les sorties de 1942 et Ghouls’n Ghosts respectivement en décembre 1984 et septembre 1985. L’éditeur décide de monter un nouveau projet de jeu d’arcade et en confie la direction à Akira Kitamura. Les premiers travaux commencent et le projet prend un nom : Rockman. La direction du jeu est définie, il s’agira d’un jeu de plate-formes/action et le héros tirera des projectiles avec le plat de la main. Voyant la tournure que prend le projet, la direction de Capcom décide que le jeu n’a pas sa place dans les salles d’arcade et décide que le jeu sortira sur Famicom Disk System, une extension disquette pour la NES qui a vu le jour quelques mois plus tôt et dont la spécificité est de permettre l’utilisation de sauvegardes. La petite équipe de développement ne se doute probablement pas qu’elle est en train de donner naissance à l’une des sagas les plus prolifiques du jeu-vidéo.

Développement

En avril 1987, les travaux sur Rockman avancent bien. Capcom décide d’embaucher un jeune graphiste/illustrateur tout fraîchement diplomé : Keiji Inafune. Akira Kitamura, en charge du projet, a déjà dessiné une ébauche du sprite du héros et confie à Inafune la tâche de finaliser le design. Inafune conçoit donc un design à partir du sprite de Kitamura et comme l’équipe est très réduite, il adapte le sprite de Rockman pour qu’il colle avec son design. Si Inafune n’est pas le créateur de Mega Man, il sera donc celui qui lui donnera son design définitif à la fois pour les artworks et les jeux.
Dans une interview à Pix’n Love (Pix’n Love #11), Inafune déclarera que Rock est en réalité composé de deux sprites : un pour le corps et un uniquement pour les yeux. La raison ? La NES était incapable d’afficher des sprites de plus de 4 couleurs et le sprite dessiné par Inafune en comptait 5 (contours noir, beige pour la peau, deux bleus pour la tunique et blanc des yeux)… Le graphiste tenait absolument à ce que Rock ait les yeux blancs et qu’il puisse cligner des yeux pour le rendre plus expressif. Quiconque a joué à un jeu de la licence sur NES ne peut qu’approuver ce choix, le sprite de Rock est parmi un des plus réussis de la console de par la palette d’expressions qu’il arrive à transmettre que ce soit dans ses animations ou son regard. Une vraie réussite !

Un peu plus tard, l’équipe en charge de Rockman reçoit une petite visite de la direction de Capcom et celle-ci leur annonce que le jeu sur lequel ils travaillent depuis des mois va changer de nom. L’équipe marketing de Capcom trouve que le nom Rockman ressemble trop à Pac-man et il a donc été décidé que le jeu s’appellerait dorénavant Rainbow Senshi : Miracle Kid. « Senshi » signifiant « Guerrier » et l’arc en ciel faisant référence aux nombreuses couleurs que prend Rock lorsqu’il absorbe ses ennemis. Les développeurs n’apprécient pas du tout ce nouveau nom et décident de se mobiliser pour revenir au nom initial. Devant la mobilisation des développeurs, la direction finira par céder. Il est amusant de noter que Mega Man aurait pu en Occident porter le nom de Rainbow Warrior, le même nom que l’affaire qui aura remué le gouvernement Mitterrand à peu près à la même période.

inafune_featured
sprite
r2enemies


Un autre jour, l’équipe marketing de Capcom arrive dans les locaux des développeurs et voit tourner le jeu. La ressemblance entre le design de Rockman et celui d’Astro Boy saute aux yeux des marketeux qui voient en la popularité du petit robot de Osamu Tezuka un bon moyen de décupler les ventes du jeu. Le service marketing ordonne à Inafune de refaire tous les sprites pour coller à l’univers d’Astro Boy pendant qu’eux s’occupent d’acquérir les droits de la licence. Le jeune graphiste se voit contraint de refaire en urgence une bonne partie du travail déjà accompli. Quelques semaines plus tard, après plusieurs nuits blanches à peaufiner les nouveaux sprites, Inafune reçoit un coup de fil du service marketing. Celui-ci lui apprend que les droits d’Astro Boy n’ont pas pu être obtenus et tout son travail finira à la poubelle.

Alors que le développement approche de la fin, la direction de Capcom vient, à nouveau, mettre son grain de sel dans le développement et annonce que le jeu ne sortirait finalement pas sur Famicom Disk System mais sur cartouche Famicom traditionnelle. Les raisons de cet ultime changement sont, à ce jour, inconnues.


Sortie et réception

Après un développement assez chaotique, Rockman est maintenant terminé. Il sort le 17 décembre 1987… dans un anonymat quasi-total. Capcom ne croit pas à la réussite du jeu et même si les critiques de la presse sont positives, aucune promotion ne sera faite. Le jeu est produit en faibles quantités qui seront bientôt toutes écoulées grâce à un bouche à oreille positif.

Les premiers joueurs qui terminent le jeu ont la surprise de voir que le générique est exclusivement composé de pseudonymes. Dans une interview à Destructoid, Inafune est revenu sur ce point en avouant que ces surnoms était une demande de la direction. Au Japon à cette époque, la popularité des jeux vidéos a explosé en quelques années. Le jeu vidéo est vu comme le nouvel eldorado et de nombreux chasseurs de tête cherchent des développeurs talentueux afin de les recruter. L’utilisation de pseudos permettait à Capcom de conserver ses équipes. Parmi les 7 pseudonymes qui apparaissent dans le générique, celui du programmeur du jeu est bien connu des fans de Capcom : HMD. Et oui, c’est là le vrai sens du t-shirt de Joe lorsqu’il n’est pas Viewtiful ! Mais ça, vous le savez déjà car vous avez lu la Minute de Prof de Raf consacrée à ce sujet.

56746-rockman_japan-1 mm1-stageselect

Rockman sortira aux Etats-Unis dans la foulée sous le nom de… Mega Man. Dans une interview accordée à NoLife, Inafune expliquera que ce changement est une demande Capcom USA. Pour les développeurs japonais, Rock ne pouvait pas faire référence à autre chose qu’au rock’n roll mais l’équipe américaine leur fera remarquer qu’aux Etats-Unis, Rockman ça signifie « l’Homme Rocher » et que le public ne comprendrait pas le rapport entre un caillou et le robot bleu du jeu. Ce changement de nom ne permettra pas au jeu de rencontrer le succès qu’il mérite… Inafune accusera le très célèbre artwork qui illustre la boîte du jeu d’être responsable de l’échec du jeu en occident.

mega_man_1_box_artwork

Les ayatollahs du net avaient donc raison : Inafune a joué un rôle plutôt mineur dans la naissance de Mega Man. Mais remettre en cause l’importance du brave Keiji sur la licence en ne regardant l’histoire que par le spectre du premier jeu n’est-il pas une immense erreur ? Peut-être aurons-nous l’occasion d’en reparler…

Voir aussi :

,